La Birmanie sort d’une période de 50 ans pas vraiment folichonne. Ce n’est pas encore la liberté absolue car la junte militaire a toujours une emprise sur le pays mais la levée de l’embargo en 2012 et l’ouverture du pays ont donné un grand bol d’air frais aux birmans. Dans cet article, je n’irais pas débattre sur « Est-il éthiquement viable de voyager en Birmanie? » ou sur « Comment la Birmanie va gérer cette progression du tourisme? » Je le ferais peut-être sûrement dans un autre billet mais nous souhaitions faire le focus sur une personne qui a marqué notre séjour en Birmanie : Zaw, notre guide lors du trek Kalaw – Lac Inle.
Il est 8h30, nous faisons connaissance de Zaw qui est originaire d’un petit village proche de Kalaw, nommé Kanbani. Sous ce sourire charmeur se cache un jeune homme de 20 ans. Son prénom est répandu en Birmanie. Il nous apprendra que celui-ci est lié à son jour de naissance : il est né un Mardi. Les enfants nés ce jour voient leur prénom commencer par un S ou un Z. C’est le genre de petites anecdotes que nous avons pu découvrir lors de nos longues heures de marche.
Afin d’en savoir plus, nous lui demandons s’il étudie. Lui et d’autres jeunes de son âge, que nous avons rencontré, étudient l’anglais afin de devenir guides ou interprètes. Il n’est pas rare de croiser des étudiants ou même des moines qui vous accostent pour s’entraîner à l’anglais. Malheureusement pour eux, nous ne sommes pas les étrangers les plus adroits avec la langue de Shakespeare. Zaw, lui, étudie à Taunggyi, une ville à 75 km de Kalaw. Il y passe 2 mois de l’année en Septembre/ Octobre. Le restant, il travaille en tant que guide pour payer ses études.
Notre guide nous fera l’honneur de nous inviter chez lui. L’accueil est inversement proportionnel au confort de leur habitation. Avec une certaine naïveté nous lui demandons qui était en photo sur le mur. La réponse fut froide en évoquant leur président. Face à une certaine gêne ou une auto-censure, je ne sais comment l’interpréter, nous n’avons pas approfondi sur le sujet, ne sachant pas dans quelle mesure nous pouvions parler du régime en place.
Curieux que nous sommes, nous tentons d’aborder les questions indiscrètes. Pour votre plus grand malheur les filles, Zaw n’est pas célibataire. Non sans un petit pincement au cœur, il nous avouera qu’il est difficile pour lui d’appeler sa copine car le réseau est très mauvais. En tant que guide, Zaw possède un téléphone portable, un accès au web et même à Facebook (lorsque le réseau est accessible). C’est d’ailleurs un contraste saisissant qui nous a heurté. L’opposition entre les conditions de vie précaires et la possession d’un smartphone qui coûte 3 mois de salaires avec lequel il est difficile de téléphoner, faute de réseau.
Mais ce charmeur de nature n’a pas volé son surnom de LOVE MACHINE. Il ne se passe pas une chanson sans que le thème de l’amour ne soit pas abordé. Il est toujours prévenant, le sourire bright et a toujours la petite phrase qui fait mouche. Un autre de ses talents mis à part la chanson, la guitare et la bogosse attitude : Zaw est un excellent cuisiner. Il nous a fait à manger pendant le trek et le moins que l’on puisse dire est qu’on s’est ré-ga-lé. Pour cause, il cuisine depuis l’âge de 10 ans. Lorsqu’il rentrait chez lui, ses parents étaient encore aux champs. C’est à lui que revenait la tâche de faire à manger.
Au hasard d’un chemin , d’une araignée sur sa toile, Zaw nous distille toujours une petite info précieuse sur l’oiseau mythique de Birmanie, sur la nécessité des villages d’avoir un monastère pour construire une pagode. On a pu sentir l’enthousiasme, la fierté de nous faire partager son histoire, ses traditions.
Zaw n’a pas eu la chance d’aller au delà des frontières birmanes. A notre grand étonnement son plus grand rêve est … d’aller en Chine pour voir comment le « Made In China« est fait. Pour les birmans, c’est signe de qualité contrairement à nous occidentaux!
Tout n’est pas rose en Birmanie mais la fraîcheur de Zaw fait plaisir à voir. La soif de découverte, de partage, le bonheur d’être guide, la jeunesse birmane, tous ces aspects ont un visage, celui de Zaw. Et si la génération de Zaw profitait de cette ouverture au monde pour s’emparer de l’avenir de la Birmanie? C’est tout ce qu’on leur souhaite …